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Le théâtre était un endroit apprécié de Lyssandre, car il lui permettait d’être en société sans toute fois devoir tenir d’ennuyantes conversations durant des heures - arriver en avance et partir rapidement permettait généralement d’échapper à de nombreux colloques. Elle se rendait à de nombreuses représentations données dans le Edgard Theater. Cachée dans la loge des Lefroys, lady Spencer se délectait du jeu des acteurs et de l’architecture du théâtre, qui bien que ridicule comparée à celui de Londres, restait très jolie. Néanmoins, ce soir-là, au lieu d’observer les lieux en attendant le début de la place, Lyssandre regardait fixement le rideau pourpre qui se lèverait dans plusieurs minutes ; en réalité, elle était à des lieues de cet endroit. Sa récente rencontre avec un ami de sa défunte soeur obnubilait ses pensées. Pourquoi avait-il fallut qu’elle choisisse le village où il habitait ? Elle qui ne voulait dévoiler son histoire, si ce Matthew continuait de la harceler ainsi, son passé - ou du moins une partie de celui-ci - ne tarderait pas à être connu de tous. Les mauvaises langues allaient jaser de plus belle, et plusieurs habitants seraient blessés, ce qu’elle ne voulait pas ... Non en réalité, le mal que la vérité ferait au gens ne l’intéressait absolument pas, elle qui était dénuée de tout sentiment ; en revanche, ce qui lui importait était d’avoir un endroit où vivre. Et elle savait que si seul une partie de son histoire était dévoilée, elle se verrait expulsée du manoir des Lefroys, et de Meryton. Et personne ne la croirait si elle racontait le reste de son histoire ; la vérité était sans issue. Il ne lui restait plus qu’à trouver un moyen de faire taire le Mr. ... La première idée qui lui vint à l’esprit était inutile ; non, attenter à ses jours ne serait pas une bonne idée. Trop de risques. Quoique bien organisé .. Non. Pas bonne idée.

Le brouhaha augmentant en symbiose avec les personnes arrivant au théâtre n’avait pas réussi à tirer Lyssandre de sa réflexion, mais un son plus net le fit. Elle cligna des yeux afin de reprendre ses esprits avant de se tourner vers l’entrée de la loge ; le bruit l’ayant fait émerger était en fait un nouvel arrivant, et pas des moindres : William Lefroy. Voilà un homme qu’elle n’arrivait pas à cerner ; depuis son arrivée, il se montrait très .. protecteur envers la lady. A vrai dire, avoir un bouclier contre la mégère était Catherine Lefroy n’était pas bien gênant, même si Lyssandre ne pensait pas en avoir besoin ; ce qui dérangeait le plus la lady était plutôt qu’il la protège de tout, du moins qu’il essaye. A chaque fois qu’elle avait vent des tentatives du lord pour la défendre, elle se posait la même question : pourquoi ? Car si la jeune femme savait que la méchanceté gratuite existe, elle n’avait jamais entendu parler de la gentillesse gratuite ... Lyssandre se releva de son moelleux siège, afin de faire une petite révérence. Mis à part eux deux, la loge était vide, contrairement au reste de la salle qui semblait être plutôt remplie.

« Bonsoir, Lord. Vous me voyez heureuse de votre présence, cette loge semblait bien trop grande pour moi seule. »

Ses paroles semblaient en désaccord avec son visage de glace et son ton froid, cependant, quiconque connaissait un petit peu Lyssandre savait qu’espérer mieux d’elle revenait à demander à une vache de pondre un oeuf (XD).

William était rentré il y a peu à Meryton. Son retour avait suscité diverses réactions parmi les habitants de Meryton et parmi la famille Lefroy. Ces réactions allaient de la surprise à de la joie, de la surprise à des reproches, de la surprise à de l'amertume. Certains étaient ravis de le revoir, d'autres étaient moins enchantés. Alice, sa chère soeur qui lui avait tant manqué, lui avait reproché son départ précipité mais l'amour, qu'ils se portaient, avait été au-dessus. Sa mère, lui avait passé un sacré savon, auquel il avait écouté un mot sur deux. "Irresponsable.. chef de la famille ... dette ... argent .. réputation .. catastrophe" sont les mots qu'avait retenu William du discours interminable de sa mère, mais il n'en attendait pas moins. Après tout, il avait fui, sans prévenir personne, pas étonnant qu'on l'accueille de cette manière. Et puis il y avait ceux qui avait du être content de le voir parti, Cael par exemple après la surprise avait eu une expression extraordinaire. Rien que pour cela, William était content d'être rentré, Cael qui avait été le chef de la famille en son absence, était honteusement rétrogradé et ça n'enchantait pas ce dernier, surtout que les deux Lord ne s'aimaient pas vraiment.

Ce soir là, William avait envie d'un peu plus que l'un des repas tendus et peu agréables dont on pouvait jouir chez les Lefroy. En effet, il était peut-être revenu changé: plus positif, plus tranquille intérieurement, l'ambiance chez Lefroy était toujours aussi explosive. Chaque petite étincelle pouvait provoquer un feu d'envergure insoupçonnée. Il avait envie de se rendre au théâtre, il avait proposé à sa soeur, mais cette dernière préférait se reposer, se sentant fatiguée. Il s'était inquiétée de son état, mais elle l'avait encouragé à profiter de cette soirée. Il s'était alors dirigé vers le théâtre, en y allant il était passé devant le manoir des Leycesters, il avait hésité à leur rendre visite pour voir si Kenneth ou Elinor seraient partant pour l'accompagner, mais finalement la diligence s'arrêta seulement une fois devant le théâtre.

Il descendit et traversa le hall du prestigieux théâtre du village, il sentait bien les regards se poser sur lui, après tout, Lord Lefroy était de retour, cela alimentait la plupart des conversations. Non pas que cela réjouisse William, au contraire, mais il préférait ne pas faire attention à ses messe-basses. Il gagna enfin la loge, il avait salué des connaissances, des amis, et il fut soulagé d'enfin parvenir à ce havre de paix. Il était de nature social, mais il n'était pas encore totalement habitué à l'idée d'être de retour à Meryton. Cela lui faisait encore bizarre. Il referma la porte de la loge et se retourna pour voir qu'il n'était pas le seul à avoir eu l'idée de cette sortie chez le Lefroy. Lyssandre Spencer se tenait devant lui.

Il s'inclina légèrement pour la saluer comme le veut la tradition et lui sourit aimablement, malgré son visage de glace. William a toujours été protecteur envers ceux qui le méritait. Peut-être sa vocation d'avocat influençait là-dessus, mais il se devait de protéger Lyssandre. Pourquoi ce sens de devoir? Peut-être car Lyssandre était arrivée à peu près en même temps que lui, et qu'il comprenait plus que jamais ce que cela faisait de débarquer à Meryton. Bien sur, lui n'y arrivait pas pour la première fois, mais cela n'empêchait pas de subir des ragots et autres rumeurs. Lyssandre était une nouveauté, et donc un sujet de conversation intéressant. Alors quand il entendait des paroles infondées et douteuses et la défendait, cela lui paraissait normal. Il la protégeait des habitants du village et de sa mère aussi, qui était trop intéressée par sa bourse trop bien fournie.

- Lady Spencer, si j'avais su que vous vous rendiez au théâtre ce soir, j'aurais proposé de vous accompagner! *vient s'assoir à côté de Lyssandre* En effet, la loge est bien vide. A croire que se divertir n'est pas vraiment un priorité chez les Lefroy.

Il lui adressa un sourire triste, quelque peu mélancolique. William voudrait réellement que l'atmosphère du manoir change, qu'elle revienne telle qu'elle était il y a peu, quand son père était encore vivant. L'ambiance pesante l'exaspérait déjà avant son départ pour Londres. Mais maintenant qu'il était de retour et qu'il voyait que rien n'avait changé, que cela avait empiré avec la tempête, il désespérait de voir un jour les Lefroy heureux. Comme si la famille était maudite, et d'un côté il s'en foulait fortement. C'était à lui d'agir pour améliorer cela, après tout il était responsable de cette famille.