« Oh Georges... euh quel plaisir. Vous m'excusez mais il fait vraiment chaud ici, je vais allez me désaltérer au buffet. »

Après une petite courbette, Abigaël s'échappa aussi vite que lui permettait sa robe. Elle avait beau y mettre toute sa volonté, elle ne pouvait plus le supporter plus de quelques minutes. Il faut dire que ça faisait déjà plusieurs jours qu'il lui demandait de danser avec elle au bal. Presque s'il ne restait pas sous sa fenêtre la nuit à la supplier. Il y avait des limites à ne pas dépasser. Geoges était quelqu'un de très gentil, au physique disons particulier, mais affreusement collant. Abigaël avait employé toute la courtoisie et la diplomatie dont elle était capable mais elle arrivait à saturation. En chemin elle croisa Kenneth, et c'est là qu'il lui proposa une danse. Officiellement c'était son cavalier mais officieusement tout le monde savait qu'elle serait loin d'être la seule avec qui il danserait, ce qui ne dérangeait absolument pas notre chère Abigaël. Elle avait pris la nouvelle du bal comme une bonne occasion de faire des nouvelles rencontres tout en dansant, l'une de ses nombreuses passions. Sa tante l'avait en plus de ça encouragé à découvrir les bals de Meryton, ils valaient apparemment le détour. Abigaël avait rencontré Kenneth il y a peu et ils s'étaient de suite bien entendus et c'était donc avec plaisir qu'elle avait accepté son invitation. Elle avait passé l'après midi à se préparer avec sa tante jusqu'à en oublier l'heure. Oh et puis il ne lui en tiendrait pas rigueur, elle n'était pas en retard, c'était les autres qui étaient en avance. Si elle se complaisait à penser cela, tant mieux pour elle n'est ce pas ?
Sa tante avait raison. La salle était vraiment bien décorée et le contraste entre toutes les tenues étaient saisissant. Elle était contente que le bal soit ouvert à tout le monde et non seulement au gens de l'aristocratie ou rien qu'au paysan, cela offrait un bien plus joli tableau. Et c'était bien plus amusant quand on tenait une conversation comme celle qu'elle avait avec Kenneth et qui ne la choquait nullement.

« Fort malheureusement non, mais les règles n'ont-elles pas été créées pour être enfreintes ? dit-elle un sourire espiègle au bout des lèvres. Après tout, un homme comme vous mériterait bien d'avoir plusieurs femmes. »

Bien sûr, elle plaisantait. La jeune femme avait toujours eu une vision idéaliste du mariage, il fallait tout de même rappeler que c'était à cause de cela qu'elle s'était retrouvée à Meryton. Apparemment ça ne se faisait pas de planter un aristocrate à un mariage, elle avait encore beaucoup de choses à apprendre...

Un deux trois, un deux trois...
La valse que dansaient nos deux personnages prenaient un rythme de plus en plus plaisant au fur et à mesure qu'ils la dansaient. Les gens autour d'eux semblaient aussi réjouis qu'eux, mis à part ce pauvre Georges qui voyait la jolie Abigael dans les bras de Kenneth. Kenneth aimait faire des jaloux dans la salle, et apparemment, cela arrangeait sa cavalière reconnaissante pour ce geste. Ils continuèrent donc de parler au second degré, de futilités telles que la polygamie.

ABIGAEL: Fort malheureusement non, mais les règles n'ont-elles pas été créées pour être enfreintes ? Après tout, un homme comme vous mériterait bien d'avoir plusieurs femmes.

Kenneth ne connaissait pas encore l'histoire d'Abigael, le pourquoi du comment elle s'était retrouvée chez les Prices au beau milieu de Meryton. Néanmoins, d'après ce qu'il connaissait d'elle, il savait qu'elle se faisait avocat du diable lorsqu'elle abordait le sujet du mariage : elle n'avait pas l'air d'une jeune fille libertine. Il appréciait le fait qu'elle ne soit pas une fille coincée qui prendrait tout sérieusement. En tout cas, si Abi' lui racontait un jour ses mésaventures, il prendrait directement son parti : derrière ses airs de coureur de jupon se cachait en fait un véritable défenseur des femmes. Il détestait les mariages arrangés et ne concevait pas que la femme puisse être inférieure aux hommes légalement. En même temps, il avait été éduqué dans une famille aux croyances plutôt modernes, où les femmes régnaient pratiquement dans le foyer.

KENNETH : Vous me flattez ET j'aime comment votre esprit raisonne ! Vous ai-je déjà dit que vous êtes la cavalière idéale pour une pareille occasion ?

Kenneth lui fit un clin d'oeil, tout à fait amical, et se mit à rire aux éclats. Il pensait pareil, au sujet des règles. Il n'aimait pas non plus les conventions sociales, les règles de politesse, les règles de bienséances, etc. etc. Kenneth désigna ensuite Georges, un verre à la main, l'air bouche bée à les fixer. Il paraissait terriblement déçu.

KENNETH : Mais dites-moi... y'a-t-il une raison pour laquelle vous n'avez point accordé de danse à ce gentleman ? Je me sentirai bien trop fier si je pensais que vous préférez ma compagnie. N'y'a-t-il pas un homme - hormis moi - qui aurait une chance avec vous, parmi l'assemblée ?